Résumé :

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It looked like love. It felt like love. But this isn’t a love story.

Amelie fell hard for Reese. And she thought he loved her too. But she’s starting to realize that real love isn’t supposed to hurt like this.

So now she’s retracing their story, revisiting all the places he made her cry. Because if she works out what went wrong, perhaps she can finally learn how to get over him.
Extraits :

He must love me.

« Can we go to this hotel then ? Talk things through ? »

He let me squirm on the hook a moment or so longer. Then he smiled.

Then he said, « Or maybe, instead of talking, you can make it up to me ? »

He wrapped his fingers in mine and pulled me into him. The drunk people cheered for us as we kissed under the announcement borad. Then he tugged on my arm, and he started walking me to the hotel he’d bookded. The hotel where it happened. […]

« You’d do it if you loved me. »

« But, Reese… »

« Everyone does it. I love you Amelie. Look, I’ll take it slow. Really slow. I promise I’ll stop the second it hurts, but it won’t. »

« I’m not sure. »

« Just try. For me, try. I thought you loved me. »

« Of course I love you. »

« Then show me. Try. »

No…

No no no no no…

« I guess I can try. »

[…] I’m back at my hotel and I’m screaming. I’m under the showerhead again and I’m still screaming. I feel like I’ve been screaming since it happened but no one can hear me. They must be silent screams. Or it’s just I have nobody left in my life to listen to them, to care about them.

You lied, Reese. You said you would take it slowly, but you didn’t. You said you would stop if it hurt, but you didn’t. In fact, when I said it was hurting, you only got rougher. »

[…]

Then she asks a question, Reese. One that nobody has thought to ask before.

« Reese… Was he… did he… I mean, was he nice to you, Amelie ? »

The rooms feels very small all of a sudden, the walls flexing and boxing me in as I consider my answer. And my immediate response isn’t « Yes ».

« He loved me », I say;

Because that’s what you always said, after you did anything bad.

Critique :

Ce roman est un magnifique coup de cœur. Amelie, c’est la petite nouvelle fraîchement arrivée de Sheffield dans le Yorkshire, ville dans laquelle elle a su briller de par ses talents de compositrice-chanteuse et grâce au soutien apporté par Jessa et Alfie, son dernier petit ami en date. Mais, dès qu’elle débarque dans son nouveau lycée, elle ne peut s’empêcher de se faire remarquer par Reese Davies, leader et guitariste d’un groupe de rock. Sourire charmeur, ne se séparant jamais de son chapeau fétiche, il a la côte auprès des filles avec lesquelles il aime s’amuser.

Aussi, quand il s’intéresse à Amelie, le doute s’installe : qu’en est-il de sa relation avec la fabuleuse personne qu’est Alfie ? Peut-elle ainsi succomber à la passion et renier tout ce qu’elle a construit avant ? Mais Reese lui promet mondes et merveilles, succès et amour… et elle se sent si spéciale à ses yeux. Tous les indices sont là, mais elle ne les voit pas; il lui vole son moment de gloire sur scène, décrédibilise ses amis, se montre jaloux envers Alfie et, surtout, il l’a fait pleurer. Beaucoup. Cela passe par des remarques blessantes, de l’indifférence, voire cette facile (mais très efficace) punition que l’on peut infliger à la personne que l’on aime : le silence. Quoi de pire qu’une fille folle amoureuse, prête à tout pour plaire à son copain, et qui n’a, comme réponse, que ce masque froid, distant et méprisant ? La violence psychologique est bel et bien installée. En la faisant sans cesse passée pour folle, elle perd toute confiance en elle et est convaincue qu’elle est responsable de tous les malheurs de Reese et de leurs disputes. Un mécanisme pervers se met en place; d’un côté il l’isole de ses amis, de l’autre il l’exhorte à ne pas dépendre que de lui. Rien que le surnom qu’il lui donne, « my little thing », démontre bien que l’emprise est là et qu’elle n’est plus traitée comme un être humain, mais comme une chose à sa merci. Cerise sur le gâteau, alors qu’elle doit définitivement renoncer à Alfie lors d’une escapade à Sheffield, Reese en profite pour lui donner un moyen de se « racheter », à savoir : coucher avec lui. Amelie ne veut pas. Elle l’exprime, clairement, plusieurs fois, mais, devant l’insistance d’un copain qui menace de s’en aller à tout moment, elle cède. Et cela tourne au cauchemar quand, dans une chambre d’hôtel, elle se fait violée par un Reese qui ne se soucie nullement de savoir si elle a mal.

Amelie subit une pression constante, en particulier parce qu’il lui donne l’impression de n’être et de ne jamais faire assez. Soudainement, il se détourne d’elle et s’intéresse à la jolie Eden, fraichement arrivée dans la bande. Encore un « red flag », tous ces petits éléments que Mme Clark, son professeur de musique, tente de lui montrer, tout en lui ouvrant les yeux sur la situation de laquelle elle est prisonnière : « It isn’t love, Amelie. » En discutant, en retraçant son chemin et l’histoire « d’amour/abus » qu’elle a vécue avec Reese, elle se rend compte qu’il a profité de sa naïveté pour mieux la détruire. A chaque fois qu’elle évoquait sa réussite, il se montrait jaloux et boudait dans son coin au lieu d’être fier d’elle. Cette attitude va d’ailleurs avoir un effet néfaste sur Amelie, qui sous-estime alors ses capacités pour ne plus l’offenser. Dès l’instant où il l’a fait pleurer, il la sermonne pour sa sensibilité. L’insulte « bitch » va aussi s’échapper de ses lèvres, alors qu’elle est déjà dans une grande détresse psychologique. On parlerait presque d’un syndrome de Stockholm, avec une victime trop attachée à son bourreau pour réaliser qu’il est en train, pernicieusement, de la tuer à petit feu.

Heureusement, Amelie est pleine de ressources et son succès elle ne le doit qu’à son talent. A ses amis, et plus particulièrement à Alfie, elle va se confier et même trouver de l’aide auprès de thérapeutes compétents pour se réapproprier son corps et son esprit. Finalement, le processus de deuil de sa relation s’installe : « I‘m grieving for the girl I was before you mesmerized me and idolized me and make us both feel like our love would move mountains. I’m mourning for the girl I was before you started grinding me down and making me believe everything I was was wrong. I’m mourning the girl who had friends that you gradually, carefully – ever so subtly, so I can never prove you did it at all – forced me to get rid of. I’m grieving the girl you manipulated into sex and then brutally raped while she was crying. The girl who still has nightmares, and got referred to specialist trauma recovery therapy to try and help come to terms with what you did to my body. I’m grieving my parents, who still can’t believe such a thing could happen to their own girl, not when they’d tried so very hard to protect me from boys like you. I’m grieving the loss of all of our innocence. » Il n’est jamais évident d’ouvrir les yeux et d’accepter que la personne qu’on aime – et qui prétendait nous aimer en retour – puisse nous faire du mal. La désillusion est terrible : « It wasn’t love in the slightest. It was abuse. ABUSE. »

Et la conclusion de cette histoire poignante, qui brise le cœur au fur et à mesure qu’on observe Amelie perdre tout son éclat et s’enfoncer dans un tourbillon de honte, de dépréciation d’elle-même et de souffrance, est pourtant pleine d’espoir pour la jeune fille : « There’s a trail of salt across the country, from the tears that rolled down my cheeks, marking the path of this mess, but it ends here. Because you know what ? I hardly ever cry any more. » Reese pensait la posséder pour mieux la briser ; au final, il a contribué à faire d’elle une femme forte et indépendante, désormais armée pour faire face aux difficultés de la vie. Une bonne leçon d’apprise : voilà ce qui arrive quand on fait confiance à quelqu’un – ça peut faire mal. En particulier quand on sait que ce sont ceux que nous aimons le plus qui ont le pouvoir de nous détruire. Aimer, c’est prendre un risque ; celui de jouer son cœur, sachant ô combien il est fragile et peut se briser en un claquement de doigt, pour un seul geste ou une parole prononcée. En définitive, ce roman décortique efficacement les rouages des violences conjugales, de leur mise en place aux conséquences désastreuses pour les victimes.