Synopsis :

A peine remise d’un récent traumatisme, Devi, une adolescente indo-américaine, retourne au lycée déterminée à se débarrasser de vieilles étiquettes embarrassantes et à devenir une vraie miss popularité.

Citation (Devi & Ben) :

« Are you suggesting an alliance between us ? That’s like North and South Korea becoming friends. »

« Imagine how powerful they’d be. They have services air missiles and also… BTS. »

« I feel you. World domination. »

Maitreyi-Ramakrishnan-as-Devi-in-Never-Have-I-Ever

Critique :

Devi, en perdant son père puis l’usage de ses jambes, est devenue une looseuse. Alors, pour sauver sa réputation, elle embarque ses amies, Fabiola et Eleanor, sur le chemin du stéréotype de la jeunesse américaine : garçons, sexe, soirées et alcool. Tout cela dans le dos de sa mère évidemment, car, en tant que veuve indienne, elle ne peut tolérer de voir sa fille se dépraver ainsi. Et Devi ne va pas choisir n’importe quel garçon pour perdre sa virginité ; sa cible n’est que le mec le plus populaire du lycée, voir de la Californie toute entière, à savoir Paxton Hall-Yoshida (oui, il aurait des origines japonaises).

Sauf que les plans de notre héroïne ne se déroulent jamais comme prévus. Même si Paxton accepte immédiatement de coucher avec elle, Devi panique quand elle réalise qu’elle n’y connait absolument rien et prend la fuite. Pire, lorsque la rumeur d’une relation sexuelle avérée circule dans tout le lycée, la jeune fille ne la dément pas, par peur d’avoir l’air encore plus pathétique qu’elle ne l’est déjà. Son rival principal, Ben, n’hésite d’ailleurs pas à remuer le couteau dans la plaie en lui rappelant constamment que, primo, il est le plus intelligent et, deuxio, Paxton n’en a que faire d’elle. Il est vrai que le garçon a la fâcheuse manie de se rapprocher de Devi quand il en a besoin : pour les devoirs, pour venir en aide à sa sœur déficiente… Et, pour l’amadouer, il lui fait miroiter l’espoir qu’ils puissent un jour sortir ensemble, la complimentant et la sauvant in extremis d’un coyote. Elle aura d’ailleurs le droit à un surnom plutôt classe, suite à cette rencontre avec l’animal sauvage : « Coyote Girl. » Devi est aux anges… jusqu’à ce que son intérêt pour Paxton lui fait rater l’évolution de ses meilleures amies : Fabiola découvre et peine à assumer son homosexualité, tandis qu’Eleanor prend conscience qu’elle ne peut compter sur sa mère, car sa carrière d’actrice passe avant tout.

Cette série est d’autant plus intéressante qu’elle donne un aperçu de l’immigration indienne aux Etats-Unis. Et, forcément, on constate de flagrantes différences : comme énoncé précédemment, la religion hindouiste prohibe les relations sexuelles hors mariage, unions souvent décidées par les familles. De plus, on remarque que les objets sont souvent considérés comme « sacrés », induisant leur plus grand soin, et que les indiens vénèrent la divinité Ganesh, représentée sous la forme d’un éléphant. Les animaux ont d’ailleurs une place bien particulière dans leur croyance, notamment vis-à-vis de la réincarnation; à titre d’exemple, Devi est convaincue que l’âme de son père est passée dans le corps du coyote, avec lequel elle tente lamentablement de communiquer. Mais, celle qui subit de plein fouet ce choc des cultures, c’est bien Kamala, sa cousine. Qu’elle n’est pas surprise de découvrir, en dévorant le série Riverdale (production Netflix, il fallait bien faire un peu de pub), qu’une adolescente peut s’éprendre d’un garçon auquel elle n’était pas prédestinée. Car oui, Kamala est censée se marier à un richissime indien, qu’elle n’a jamais rencontrée, alors qu’elle-même rêve d’indépendance et de brillantes études. Son petit ami, Steve, peine à comprendre la pression qui repose sur ses épaules; ce n’est pas une question de choix, mais d’intérêt. Elle ne peut se permettre de déshonorer sa famille et, ainsi, risquer l’exclusion au sein de sa communauté.

Un dernier mot sur l’héroïne de la série, Devi Vishwakumar. Suivie par une thérapeute, elle est sujette aux changements d’humeur brusques et s’emporte assez facilement. Il n’est donc pas rare de la voir, sur un coup de violence, proférer des menaces ou s’en prendre à des objets (même sacrés) pour libérer ses frustrations. Et, sa relation avec Ben n’arrange rien à la situation : en constante concurrence, les pics fusent, font des ravages, si bien que même le corps enseignant ne sait plus comment les gérer. Pourtant… le fameux dicton « qui aime bien, châtie bien » finit par prendre tout son sens. Ben, imbu de sa personne et plein aux as, se révèle attentif à la détresse de la jeune fille, particulièrement quand elle se sent seule, vivant une situation similaire vis-à-vis de ses propres parents. Au fond, ils ne sont pas si différents que ça… L’excellence scolaire est un moyen efficace de gagner la reconnaissance parentale. D’ailleurs, même la stricte Nalini incite sa fille à côtoyer ce lycéen exemplaire, qu’elle pense exempté de l’attraction à la drogue et l’alcool. Finalement, les deux adolescents apprendront à mettre leur réussite individuelle de côté pour s’allier et peut-être, sur le long terme, bâtir un avenir des plus reluisant. Si Paxton ne vient pas interférer, bien sûr… En tout cas, cette histoire aura permis de rétablir la complicité mère-fille, définitivement perdue suite à la mort d’un homme admirable, à la fois papa poule et mari au grand cœur.

Bref, cette comédie dramatique télévisuelle  est un bon remède contre la dépression, pourvue à la fois fois d’humour et de grands moments de tendresse, avec, comme thématique principale, l’acception de soi et de du regard de l’autre.